Alors que les grandes Banques centrales arrivent à la fin d’un cycle de resserrement volontariste, Ostrum Asset Management (Ostrum AM) s'attend à ce que l’année 2024 soit riche en opportunités d'investissement, tout en indiquant qu’il existe encore de nombreux risques à gérer. Il y a, bien sûr, les « suspects habituels » : crédit, duration et volatilité, mais d’autres aspects sont également à prendre en compte, notamment la configuration des courbes de taux et l’augmentation des risques liés à la transition climatique.

Quelle est l’évolution probable des obligations souveraines dans ce contexte ?

Pour beaucoup d’investisseurs, les obligations souveraines occupent une place importante dans les portefeuilles, offrant un positionnement défensif, ainsi qu’une protection, contre d'autres risques associés à des classes d’actifs, comme le crédit ou les actions. Elles présentent toutefois des risques intrinsèques, en premier lieu la duration (ou risque de taux). La duration est un élément critique, car elle amplifie à la fois le risque et la performance. Les investisseurs en sont bien conscients : lorsque les Banques centrales relèvent leurs taux, ils se détournent des obligations à plus longue échéance pour éviter le risque de taux. Si l'on considère que l'année 2022 a été marquée par d'impressionnantes hausses de taux de la part de la BCE, elle constitue un bon exemple de la manière dont la duration peut affecter la performance des obligations souveraines de la zone euro : les échéances à 1-3 ans ont terminé l'année en baisse d'environ 2,50 % et les échéances à 3-5 ans en baisse d'environ 7 %. Les titres à plus long terme ont baissé encore plus fortement, affichant des pertes de plus de 15 % sur les échéances de 7 à 10 ans.

En 2023, les hausses de taux agressives se sont poursuivies, mais sont aussi arrivées à leur terme. C’est une bonne nouvelle pour les obligations souveraines, les performances redevenant positives avec une surperformance des obligations à plus longue échéance depuis le début de l’année. L’approche de la fin des hausses de taux a toutefois eu des conséquences sur la courbe des taux, qui est désormais inversée. Cette inversion provient de la partie courte de la courbe et s’explique par la rapidité et l'amplitude des hausses de taux.

Les acteurs du marché s'attachent désormais à anticiper les facteurs d’évolution du marché et les scénarios prospectifs : quelles sont les conséquences de taux plus élevés ? Sachant qu’il existe un décalage dans le temps entre les hausses de taux et leur impact sur l'économie, le risque de récession est toujours présent. Les déficits publics ? Le financement des États sera plus coûteux avec des taux de refinancement désormais plus élevés sur l’ensemble des échéances. Où en sommes-nous concernant la sortie du PEPP1  ? La fin des réinvestissements, initialement prévue pour fin 2024, devrait désormais intervenir en juillet. Les courbes de taux ? L'humeur du moment est à la normalisation, et donc à une pentification haussière ou baissière pour réintroduire la prime de risque. La duration ? L'ajout de duration est directionnel. En 2023, les investisseurs ont ajouté de la duration, alors que nous nous approchions des 3 % sur les obligations allemandes à 10 ans. Qu’en est-il enfin du changement climatique ? Nous sommes encore en retard. Des investissements importants seront nécessaires pour respecter les échéances de 2030-2050.
Ostrum AM surveille l’ensemble de ces facteurs, qui sont autant de sources de risque et d'opportunités pour l'année à venir. Bien que le marché estime que l’inflation est désormais contenue, Ostrum AM considère qu’il existe toujours un risque d’évènements extrêmes (« tail risks »), en raison, d’une part, d'un environnement plus hétérogène dans lequel les pays et les régions donnent désormais la priorité à l'indépendance énergétique et, d’autre part, des incertitudes actuelles concernant le coût de la transition énergétique. Pour Ostrum AM, ces risques signifient que les taux de la BCE resteront élevés plus longtemps que prévu et que, lorsque les taux officiels baisseront, nous ne pourrons plus anticiper des scénarios de taux négatifs comme nous avions pu le faire par le passé. Nous pourrions à la place entrer dans une nouvelle ère avec des taux à court terme ancrés à des niveaux plus élevés. Le niveau de 3 % pourrait ainsi constituer une nouvelle norme pour l’avenir.

Des risques croissants liés à la transition énergétique ?

En novembre 2022, Fabio Panetta2, membre du directoire de la BCE, a indiqué que les effets de la transition énergétique sur les prix seront largement déterminés par les évolutions technologiques et les politiques mises en œuvre par les gouvernements à l'échelon mondial. Dans un rapport de la BCE sur le changement climatique et le risque souverain datant de mai 20233, il est indiqué qu'une transition tardive se traduira par un risque de crédit plus élevé. Selon ce rapport, les facteurs de risque liés à la transition, tels que les émissions de carbone et la consommation d'énergie, ne sont pas encore pris en compte dans les notations des pays. Le rapport appelle à la stabilité financière, soulignant qu'il est important que les agences de notation intègrent l’ensemble des variables relatives au climat dans les évaluations de crédit, afin de réduire le risque de réévaluation brutale des cours et de permettre aux investisseurs d’intégrer de manière adéquate le risque souverain lié au climat.

Les évaluations de risque d'Ostrum AM relatives aux obligations souveraines tiennent compte de la matérialité ESG. Les équipes de recherche suivent une méthodologie exclusive pour évaluer les obligations conventionnelles et les obligations durables, dans le but d'identifier les pays souverains qui se classent en tête, au regard de l’ensemble des piliers ESG. Ostrum AM propose des portefeuilles souverains SFDR Article 8, avec des objectifs ambitieux liés au climat, dans le but de réduire l'intensité carbone des portefeuilles. La sélection des pays tient compte des facteurs de risque climatique.

Les facteurs de risque-opportunité liés à la duration font partie intégrante du processus d’investissement en obligations souveraines d’Ostrum AM. Les décisions de positionnement relèvent aussi bien de la gestion stratégique que de la gestion tactique des portefeuilles au jour le jour. Sachant que l’évolution des taux d’intérêt et de la courbe de taux varie au fil du temps, l'équipe de gestion en obligations souveraines d'Ostrum AM adaptera les portefeuilles à l'évolution de l'environnement. Pour réduire la sensibilité du portefeuille, l'équipe peut opter pour des échéances plus courtes ou utiliser des instruments de couverture. Lorsque les taux augmentent, l'équipe de gestion peut décider de surpondérer les obligations à plus longue échéance. Les décisions d'investissement dépendent également de l'opinion de l'équipe de gestion sur la courbe des taux. Elles prennent systématiquement en compte l'intensité carbone de chaque pays et la manière dont les changements mis en œuvre influenceront le score global d'intensité carbone du portefeuille par rapport à son indice de référence.

1 PEPP : Pandemic Emergency Purchase Programme. Programme d'achats de la BCE d'urgence face à la pandémie.
2 https://www.ecb.europa.eu/press/key/date/2022/html/ecb.sp221116~c1d5160785.en.html
3 https://www.ecb.europa.eu/pub/financial-stability/fsr/special/html/ecb.fsrart202305_03~f51dd11fd7.en.html

Perspectives 2024 – Duration et transition climatique : risque ou opportunité pour les obligations souveraines ?

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  • Isabelle Sanson

    Isabelle Sanson

    Responsable de la gestion Souverains & Inflation

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Les obligations sécurisées (covered bonds) sont un instrument de financement essentiel pour les banques de la zone euro. Le resserrement monétaire de la BCE affecte directement le marché des covered bonds à travers la réduction du CBPP3  et, indirectement, avec le remboursement des TLTRO , qui libère le collatéral constitué de covered bonds. Les prêts hypothécaires constituent le collatéral de la plupart des obligations sécurisées. Le secteur du logement a subi la hausse des taux, de sorte que les prêts bancaires aux ménages pour l'achat de logements ont diminué. Les émissions de covered bonds devraient ralentir, reflétant la diminution des flux de prêts. Les spreads sur les covered bonds se comparent favorablement aux autres classes d'actifs à faible risque.
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